COMMENT RÉAGIR FACE AU DÉPART
D’UN COLLABORATEUR PRÉCIEUX

visuel cadre

Au sein d’une équipe, la perte d’un élément important peut se révéler extrêmement préjudiciable. Pour gérer ce type d’évènement, il est crucial de comprendre les raisons de son départ, de pallier son absence et, surtout, de préparer l’avenir.

Essayer de le retenir… sans illusion

Le collaborateur sur lequel vous vous appuyez au quotidien exprime son envie de départ. Comment réagir ? Deux réflexes surviennent rapidement : chercher à comprendre pourquoi cette personne veut partir et, si possible, essayer de la retenir.

Michel Dumont, PDG du cabinet RH Euro Consulting Partners, réalise à la demande de ses clients confronté à ce type de situation une évaluation de l’environnement de travail pour « comprendre ce qui se passe dans l’entreprise, faire notre propre enquête ». Avec, à la fin de cette étape, la construction d’arguments pour contrer ces velléités de départ. Cette analyse extérieure peut aider les managers à saisir la cause d’un problème qu’ils n’avaient pas forcément vu et, par conséquent, mettre en place les mesures correctives à même d’infléchir la décision du démissionnaire.

Retenir un salarié nécessite de prendre quelques pincettes

Une opération difficile

Mais dans la grande majorité des cas il n’y a qu’une seule issue : le départ effectif. « Les entreprises gardent rarement les salariés qui veulent partir » confirme Jacques Garancher, directeur associé du cabinet RH Theodore Search.

Essayer de retenir cet employé se traduit presque toujours par un échec : c’est « un retour de bâton assuré » selon Jacques Garancher. Si l’entreprise octroie par exemple une hausse de salaire au partant, cela risque de créer une jalousie en interne qui n’arrangera rien au climat général. Ce type d’argument est donc à utiliser avec précaution et seulement s’il existe une véritable fenêtre d’opportunité pour convaincre le salarié de rester.

Gérer l’absence à court terme

Entre le départ d’un salarié et son remplacement, il existe un moment de latence qui doit être géré avec tact jusqu’à ce qu’aboutisse le processus de recrutement fait en parallèle. L’exercice est encore plus périlleux quand celui qui s’en va est un pilier de l’entreprise.

Principal levier d’action pour le manager : la période de préavis inscrite dans le contrat – généralement trois mois pour les cadres. Le manager est en position de force pour imposer au démissionnaire à effectuer l’intégralité de ce trimestre. Ces quelques mois peuvent être utilisés, dans le meilleur des cas, à enclencher la transmission des compétences spécifiques du salarié sur le départ. Mais les entreprises doivent à tout prix éviter d’entrer en conflit avec lui : rien de pire qu’une fin de contrat brutale et non amiable. Si le démissionnaire met de la mauvaise volonté dans ses missions ou s’il le rompt malgré tout, l’équipe sera privée pour de bon de ses savoirs uniques.

L'attente du remplaçant peut être pénible

Réorganisation

Autre scénario plus favorable : si le salarié partageait avant son départ ses compétences et si certaines sont indispensables pour l’entreprise, une réorganisation interne peut permettre de combler ces besoins spécifiques à très court terme. Une modification partielle ou complète du groupe de travail peut être une bonne solution tant qu’elle permet de travailler dans des conditions similaires à celles d’avant le départ. Si ce mouvement est une réussite, ce changement pourrait être pérennisé et, par conséquent, modifier le processus de recrutement qui vient.

Définir le profil-type du remplaçant

Pendant cette période de latence suivant le départ de ce collaborateur précieux doit se lancer, en parallèle, le processus de recrutement pour pourvoir au plus vite cette place vacante.

Cette quête se traduit bien souvent par la recherche d’un « clonage » des salariés : les équipes préfèreront prendre un candidat aussi similaire que possible au partant plutôt que du sang neuf, choix effectué par « près de 60% des recruteurs » selon Jacques Garancher. « La crise accroit la peur de rater son recrutement et, par conséquent, les entreprises continuent à jeter leur dévolu sur des clones ». La prudence est telle que « certaines entreprises ne recrutent des personnes à des postes commerciaux que si elles viennent déjà avec un portefeuille clients », illustre Jacques Garancher.

Dans tous les cas, un travail de réflexion sur la position vacante doit être entrepris au préalable : « si la personne part en raison de la configuration du poste (hiérarchie, salaire, ambiance, moyens…), il faut modifier au préalable la cause de ce mal au sein de l’entreprise », explique Jacques Garancher, sous peine de voir la situation se répéter à nouveau.

Interdiction pour les entreprises de rater son processus de recrutement

Comment recruter un nouveau collaborateur

Il existe deux moyens de pourvoir à la succession du démissionnaire : une réorganisation en interne ou un recrutement en externe. La première option n’est valable que si les compétences spécifiques du collaborateur sur le départ ont été transmises au préalable. En externe, trouver la perle rare s’avère de plus en plus complexe : tant les entreprises que les candidats sont de plus en plus prudents, crise économique oblige. Signe tangible de cette tendance : « l’allongement des processus de recrutement« , synonyme d’une frilosité accrue explique Michel Dumont. « Plus de tests, de prises de références sont demandés ». Entre le besoin de pourvoir rapidement le poste vacant et celui de prendre plus de temps pour être sûr de le faire correctement, il y a une contradiction qui, pour Michel Dumont, débouchera le plus souvent sur « le moindre mal : plus de frilosité ».

Les recrutements de profils spécifiques sont de plus en plus longs et complexes

Le facteur temps

L’entreprise doit alors faire un arbitrage : faut-il privilégier un candidat en tous points similaires au prédécesseur en termes de compétences techniques ou doit-il être d’abord flexible et apprendre rapidement ce qu’il doit savoir ? Le choix se fera en fonction du besoin de l’équipe : si le processus de recrutement doit être rapide (poste crucial, connaissances spécifiques non partagées…), elle sera amenée à prendre le risque d’engager un profil différent mais adaptable. Il faudra alors que le profil sélectionné soit capable de reprendre les compétences particulières de son prédécesseur dans un court laps de temps.

Une erreur quant au candidat choisi va, a contrario, coûter cher : se séparer de ce nouveau collaborateur puis relancer l’intégralité de la recherche du remplaçant sera à la fois long et plus coûteux qu’envisagé. Si l’entreprise peut prendre son temps pour trouver la perle rare qui la satisfera forcément, elle n’a par conséquent aucune raison de prendre ce risque.

Comment éviter que cette situation se reproduise ?

Rien de mieux pour empêcher ce type de situation que l’anticipation. Premier axe : la transmission des compétences. Michel Dumont se place contre la spécialisation accrue des parcours et suggère au contraire que « tout le monde ait un périmètre d’action généraliste ». Si les connaissances de chacun sont partagées, le départ de l’un ou l’autre des collaborateurs posera moins de problèmes.

La transmission des compétences doit être au cœur de l'esprit de l'entreprise

Attention permanente

Le manager se doit d’être particulièrement vigilant : « il est souvent le dernier informé » du départ du salarié, explique Michel Dumont. Dès les premiers bruits ou rumeurs, le responsable doit anticiper la transmission de ces compétences. Il peut par exemple mettre le collaborateur dans une position difficile, surtout s’il n’a pas annoncé officiellement son départ. « Tout est question de finesse et de psychologie, estime Michel Dumont. Par exemple, on peut lui dire qu’un collègue a besoin de tel type de compétence pour le développement de son département et lui demander s’il pourrait la lui transmettre ». Il n’aura alors que deux options : obéir et ainsi enlever une épine du pied de son entreprise ou, s’il refuse, être mal à l’aise car il devra justifier sa position…

Les dirigeants doivent aussi avoir en tête qu’un salarié désire rarement rester au même poste pendant toute sa vie professionnelle. « Les cadres se lassent dans une période de 3 à 5 ans » précise Jacques Garancher, qui considère qu’« il faut mieux déplacer un talent plutôt que de le perdre ».

Journal du Net Dossier réalisé par Gwendal Perrin Publié le 02 avril 2012

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